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Publié le : mardi 22 novembre 2005
Quinze ans pour le meurtrier délirant
Jean-Christophe Lièvre, 35 ans, a basculé peu à peu dans la paranoïa délirante. Photo Alexandre MARCHI
Jean-Christophe Lièvre avait sauvagement tué un Nancéien avant de se débarrasser de son corps coupé en deux dans la Mortagne.
NANCY. - En dépit de deux journées de débats, on ne saura jamais exactement comment se sont enchaînés les faits qui ont conduit à la mort de PierrickLecointre, dans la soirée du 14 août 2003, à Blainville-sur-L'eau (54).
L'accusé, Jean-Christophe Lièvre, 35 ans, abruti de neuroleptiques, donne une version qui ne coïncide pas vraiment avec celle livrée par le médecin-légiste, vendredi.
Le mobile ? « Il m'a énervé. , articule tant bien que mal Jean-Christophe Lièvre. Il paraît sincère. Tente de répondre sans détour au président Jean-Michel Perrin. Une chose certaine. L'accusé s'est acharné sur sa victime, avec lequel il entretenait des relations amicales depuis un an ou deux. Lui a asséné des coups violents sur la tête avec l'accoudoir d'un canapé et l'a étranglé. Il lui a porté des coups de couteau aussi, à la gorge, même si ceux-ci, selon le spécialiste de médecine légale, ont été donnés post-mortem.
Quelques heures après sa « furie », Jean-Christophe Lièvre a encore coupé en deux le corps de sa victime, jeté les morceaux conditionnés dans des sacs poubelles dans la Mortagne. Un dernier acte macabre réalisé avec la complicité de Daniel Prevost, 48 ans, poursuivi à ses côtés, pour recel de cadavre. « C'était effroyable une chose pareille. J'étais tétanisé par la peur », lâche l'homme aux traits épais.
« Une caméra dans la dent "
Longiligne, une allure adolescente, Jean-Christophe Lelièvre a l'air hébété. Revient dès qu'il le peut, sur la thèse du grand complot organisé par la mafia. « C'est dommage dans cette affaire, personne ne me croit. Pourtant, on m'a bien inoculé le virus du sida ». D'après son entourage - son petit ami, sa tante, sa mère - la découverte de sa séropositivité l'a définitivement fait basculer dans une paranoïa délirante.
Quelques années plus tôt, il imputait déjà la mort de son grand-père et celle de son père instituteur à des empoisonnements. Dès 2002, ses divagations n'ont plus de limite : un dentiste lui a implanté une caméra dans la dent, les insectes sont chargés de le surveiller pour le compte de forces obscures qui en veulent à sa vie...
Son oncle, dans une déposition poignante, raconte son parcours du combattant pour tenter de l'aider, notamment au cours du printemps qui a précédé les faits, la dizaine de spécialistes, les services psychiatriques d'urgences contactés sans succès... « Je veux dire à la famille de la victime que j'aurais voulu faire autrement », lâche-t-il entre deux sanglots.
« Il aimait Renaud »
« L'irréparable n'a pu être évité », appuie l'avocate nancéienne de la défense, Me Armelle Kolb.
La mère et le jeune frère de Pierrick Lecointre, appelés à la barre pour esquisser le portrait de celui perdu dans des conditions atroces, ne peuvent pas retenir leurs larmes non plus. « Il aimait Renaud, m'écoutait, me conseillait », brosse admirativement le second.
« Quel type d'homme faut-il être pour commettre un acte aussi abominable ? », interroge Me Berna, conseil nancéien des parties civiles.
« Les experts ont retenu l'altération du discernement mais pas son abolition », maintient l'avocat général Jacques Nicolle. « Autrement dit, il pouvait contrôler ses actes. Même un peu », observe-t-il, requérant une peine de 15 années de réclusion à l'encontre de Jean-Christophe Lièvre. Et réclamant 1 mois de prison pour Daniel Prevost. Les jurés ont suivi.
Valérie RICHARD
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